Media12-Bonneval

8 juillet 2015

Ce divin chocolat de l’abbaye de Bonneval

L’abbaye Notre-Dame de Bonneval est un endroit extraordinaire, hors du temps mais en lien avec l’humanité, où vit une petite communauté de moniales cisterciennes qui, entre prière et communion, fabrique un chocolat d’exception à destination des plus gourmands des mortels.

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Avant même d’avoir franchi le porche surmonté d’une magnifique Vierge romane, on se surprend à baisser la voix, à faire son pas plus léger. Malgré soi. Le lieu est tellement plein de paix que cette sérénité en devient consistante et, comme une ouate, étouffe les bruits, ralentit les mouvements. L’abbaye de Bonneval semble enchâssée dans la forêt qui couvre cette boralde de Flaujac, à quelques minutes d’Espalion. Cela ressemble à un paradoxe : depuis le fond de cette vallée si profonde, le ciel semble si haut, si loin. Faut-il, pour lui parvenir, que les prières des moniales qui vivent ici soient pleines de ferveur! Et faut-il, aussi, qu’il soit bon, ce chocolat fait dans ces murs, pour que sa réputation ait quitté cet endroit secret pour parcourir le monde! Depuis le renouveau de l’abbaye cistercienne, à la fin du XIXe siècle, les moniales de Bonneval fabriquent du chocolat qu’elles vendent pour subvenir aux besoins de leur communauté.

«La fabrication du chocolat n’est qu’un moyen de subsistance, précise sœur Anne-Claire, adjointe de la Supérieure. L’objectif premier de notre communauté, c’est la vie monastique, autrement dit la recherche de Dieu.» Est-ce Lui qui inspire de si divines recettes ? Chocolat noir, chocolat praliné, chocolat au café, au thé d’Aubrac, aux éclats de noisettes, au thé fumé, au gingembre, aux pétales de rose, à la bergamote, aux oranges confites, à la crème confiseur… Des tablettes, des malakoffs, des bouchées, des bonbons, des bouteilles à la liqueur… La chocolaterie de Bonneval doit être parmi les toutes dernières, en France, à fabriquer encore son chocolat à partir des fèves de cacao. Tous les autres chocolatiers, y compris les plus renommés, transforment un chocolat qui leur est livré en tablettes. Il y a quelques années encore, l’abbaye de Bonneval achetait même les cabosses du cacaoyer, dont les moniales tiraient les fèves et en torréfiaient les amandes. Aujourd’hui, la chocolaterie de Bonneval travaille à partir d’éclats de fèves torréfiées. «Travailler à partir de la matière première et non d’un produit déjà transformé nous permet de faire un chocolat qui nous est propre, celui que nous aimons; c’est un grand privilège que m’envie bon nombre de mes confrères chocolatiers», s’amuse Xavier Piton, responsable de la fabrication.

Les éclats de fèves sont malaxés jusqu’à former une pâte qui, chauffée, donnera la liqueur de cacao puis le beurre de cacao. Du sucre est ajouté, ainsi que divers ingrédients, selon le type de chocolat en préparation : lait en poudre, café moulu, beurre, noisettes broyées… Cette préparation passe ensuite dans une broyeuse pour atteindre une finesse extrême, avant de rejoindre la conche où elle est malaxée pour gagner en onctuosité et arôme. «Ici, nous doublons le temps de conchage par rapport à ce qui se fait généralement dans l’industrie», précise soeur Anne-Claire. De la conche, le chocolat est ensuite acheminé vers la tempéreuse par une canalisation chauffée. C’est l’une des phases les plus délicates de la fabrication, qui impose un subtil jeu de changements successifs de températures, afin d’amener le chocolat à son état idéal de cristallisation, avant le moulage en tablettes, en napolitains ou en bonbons. C’est de cette phase de tempérage, où intervient toute la science du chocolatier, que dépendent l’aspect lisse et brillant du chocolat une fois refroidi, sa dureté et son fondant.

Il y a aussi le mystère des bouteilles à la liqueur. Comment fait-on entrer le spiritueux dans ce bonbon de chocolat hermétique ? En réalité, ce n’est pas la liqueur qui entre dans le chocolat mais le chocolat qui drape la liqueur. Pour ce faire, les empreintes des bouteilles (ou de tout autre bouchée) sont formées en creux dans de grands châssis pleins à ras-bord d’amidon. Ces empreintes sont ensuite remplies de liqueur (rhum, poire ou triple-sec). L’amidon absorbe alors une partie de l’eau contenue dans la liqueur et cristallise en formant une mince pellicule de sucre solide autour du liquide. Ces délicates ampoules sont ensuite napées de chocolat noir.

Autrefois, seules des religieuses travaillaient à la chocolaterie, entretenant ce savoir-faire légué au XIXe siècle par leurs aînées, elles mêmes formées par l’abbaye-mère d’Aiguebelle. Mais la communauté vieillissante a dû se résoudre à recruter des chocolatiers professionnels pour les épauler. Trois hommes heureux de travailler dans un environnement où l’humain et l’éthique passent avant toute autre considération. Les moniales sont désormais affectées, pour la plupart, à l’emballage des chocolats. Il y a un an seulement, la production était encore supervisée par sœur Anne qui, malgré un corps voûté sous le poids des années, manipulait toujours les bidons de fèves, grimpait au pétrin et gardait un œil vigilant sur toutes les phases de fabrication. «Elle était extraordinaire !, évoquent d’une même voix sœur Anne-Claire et Xavier Piton. Elle avait tout assimilé des évolutions technologiques qui ont jalonné sa carrière et travaillait avec entrain et bonne humeur.» Son âge faisait d’elle la doyenne des chocolatières dans le monde, comme on aimait à l’indiquer à l’abbaye. Sœur Anne est décédée en janvier 2015 à l’âge de 94 ans. «Rappelée à Dieu», indique un portrait souriant, affiché au mur de la salle du pétrin.

Les moniales ont recruté des chocolatiers, mais n’ont changé ni les méthodes de fabrication ni la rigueur apportée au choix des matières premières. Ni le matériel. A l’abri de toute tentation de rentabilité ou de productivisme, les religieuses n’ont pas jugé utile d’investir dans des lignes de fabrication modernes. La chocolaterie fonctionne toujours avec du matériel qui a souvent plus de cinquante ans d’âge. Mais c’est aussi ce qui lui assure une certaine pérennité. «Ce sont des machines éprouvées, très résistantes et dont nous pouvons assurer la maintenance sans difficulté»,explique sœur Anne-Claire en technicienne avertie. «Certains fabricants de matériel professionnel rêvent même de nous les acheter pour s’en inspirer», rigole Xavier Piton.

Détentrice d’un savoir-faire historique, la chocolaterie de Bonneval a récemment obtenu le label Entreprise du Patrimoine Vivant. Par ailleurs, ses produits portent tous le label Monastic, qui garantit une fabrication en milieu monastique. La gamme des chocolats de Bonneval, garantis pur beurre de cacao, sans autre matière grasse végétale, ni arôme artificiel, ni colorant, ni conservateur, est distribuée partout en France, essentiellement dans des monastères et abbayes. En Midi-Pyrénées, on trouve aussi les chocolats de Bonneval dans de nombreux commerces traditionnels, boulangeries, épiceries, confiseries et grandes surfaces.

Savoir plus : www.abbaye-bonneval.com

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