Né de la série télé La clé des champs, diffusée en 1998, l’atelier de coutellerie de Sauveterre poursuit crânement son aventure artisanale sans les projecteurs de la fiction. Quinze ans après, il produit toujours des couteaux d’exception pour des clients internationaux et exigeants.

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Quand Gaumont a imaginé produire pour France 2 une série télé évoquant la coutellerie, il y avait déjà deux bons siècles que ce savoir-faire avait déserté Sauveterre. La bastide royale, pourtant, avait été l’un des principaux centres de production du sud de la France, au XVe siècle. Mais l’avènement des hauts fourneaux dans le Nord éloigna Sauveterre des nouveaux pôles de production d’acier et la coutellerie locale périclita, faute de pouvoir être approvisionnée de manière régulière, laissant la place aux ateliers de Thiers.

Qu’à cela ne tienne ! Le scénario écrit par Brigitte Peskine décida que la Clé des champs raconterait l’histoire d’une executive woman qui décide de revenir à l’Aveyron de ses origines pour reprendre la coutellerie paternelle de Sauveterre. Pour les besoins du téléfilm, un atelier a donc été entièrement reconstitué avec des machines en état de marche, achetées à Thiers. Et un couteau de Sauveterre a été conçu pour l’occasion par un compagnon thiernois, Henri Viallon, à partir d’un modèle de couteau aveyronnais fabriqué au XIXe siècle. Ainsi a été recréée la coutellerie de Sauveterre, pour les besoins de la fiction.

L’histoire aurait pu rester fiction si Guy Vialis, meilleur sommelier de France et concepteur, en 1993, du couteau sommelier Château Laguiole, n’avait décidé de prolonger l’activité de l’atelier au-delà du tournage du téléfilm et de rendre à Sauveterre une vraie activité coutelière pérenne. « L’atelier a commencé son activité réelle le 1er avril 1998, quelques mois après la fin du tournage et deux semaines avant la diffusion du premier des six épisodes, se rappelle Cyrille Manelphe, chef d’atelier. Pendant toute la durée de la série, les commandes n’ont cessé d’arriver, ce qui a permis à l’entreprise de démarrer dans les meilleures conditions. »

Des couteaux d’exception

Quinze ans après, l’atelier de Sauveterre fonctionne toujours. Trois couteliers (Cyrille Manelphe, Gilles Barbance et Mathieu Savy) y produisent neuf à dix pièces par jour. Des couteaux de Sauveterre, mais également d’autres modèles : l’Aurillac, l’Alpin, le Gwalarn, le Camembert, le Bordeaux et, bien sûr, le sommelier Château Laguiole qui fête son vingtième anniversaire. Des modèles de poche et de table. De la série et du sur-mesure. « Le sur-mesure, c’est notre valeur ajoutée, explique Cyrille Manelphe. Nous pouvons fabriquer le couteau que le client désire, avec le design, les aciers et les matériaux de son choix ». Bois précieux, corne, os, mammouth, galuchat, verre… L’atelier de Sauveterre ne s’interdit rien. « Nous sommes toujours à l’affût de nouveau matériaux pour nous démarquer », glisse le chef d’atelier. Ce fut le cas, par exemple, quand Guy Vialis décida d’acheter le tulipier de Marie-Antoinette, abattu par la tempête de 1999 dans le parc de Versailles. Pour l’heure, entre vagues de visiteurs et fabrications de toutes sortes, l’équipe de Guy Vialis attend que Paolo Basso ait arrêté le choix du design de son couteau. Le Suisse, élu meilleur sommelier du monde en 2013, va se voir doté, comme tous ses prédécesseurs, d’un Château Laguiole fabriqué à Sauveterre.